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Le meilleur exploit de Carlos Ghosn : être un père « réussi »

Carlos Ghosn est bien prophète en son pays. Des associations profitent de chaque escale occasionnelle du patron de l’alliance Renault-Nissan dans son pays natal, pour l’honorer. Lundi, c’était au tour de l’ONG Loubnaniyoun de lui exprimer sa gratitude pour ses dons qui ont permis de subventionner la scolarité de 270 écoliers libanais.

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Arrivé à la salle Issam Farès de la Notre-Dame University, à Zouk Mosbeh, dix minutes avant l’heure pour la cérémonie prévue en son honneur, Carlos Ghosn se montre souriant et affable, se levant souvent de son siège pour embrasser chaleureusement les personnes qu’il connaît et saluer avec courtoisie les autres, en accordant à chacun un petit mot détendu.
La cérémonie commence devant plus de 250 personnes enthousiastes, en présence notamment du ministre du Tourisme, Michel Pharaon, et du représentant du ministre de la Culture, Rony Araiji, Boutros Frangié.
Le journaliste Ricardo Karam, animateur de l’événement, amorce son mot d’accueil avant d’annoncer la projection d’un documentaire sur l’association bénéficiaire de la dotation de Carlos Ghosn, Loubnaniyoun, dont le slogan Pour un Liban meilleur exprime un engagement civique, tant sur le plan médical qu’aux niveaux économique, éducatif ou encore environnemental.
La présidente de Loubnaniyoun, Nadine Daher, prend ensuite la parole. « Vous avez vaincu l’impossible », lance-t-elle à l’adresse du PDG de Renault-Nissan, louant son « engagement au service de l’homme ». Elle le remercie d’« investir dans l’avenir des générations du futur » et le décrit comme « la branche (“ghosn” en français) qui ne porte que les bons fruits ».
Apres un court intermède animé par le ténor Edgard Aoun et la troupe Swandance, c’est au tour de Souheil Matar, vice-président des affaires culturelles et des relations publiques à l’université, de prononcer son allocution, présentant à Carlos Ghosn ses excuses de le recevoir « dans un Liban dénaturé par l’échec, la paralysie, les divisions et les vols ».
Ricardo Karam invite ensuite le PDG à le rejoindre pour une conversation à bâtons rompus, devant une audience captivée par des sujets allant de l’identité de ce citoyen du monde jusqu’aux secrets de sa réussite, en passant par des questions plus privées concernant certains de ses goûts et surtout ses relations avec ses enfants.

« L’identité, ni faiblesse ni force »
En réponse à une question de Ricardo Karam qui tenait d’abord à savoir si la nationalité libanaise détenue par l’industriel international est pour lui un fardeau ou au contraire une fierté, celui-ci confie d’emblée qu’à ses yeux, « les identités ne sont ni faiblesse ni force ». Et de souligner : « Je n’ai pas de complexe envers ma “libanité”, j’aime le Liban, mais j’aime aussi le Brésil où je suis né et la France où je travaille. » Indiquant que dans son expérience professionnelle, ses trois identités n’ont jamais été importantes, il explique : « Lorsque je suis arrivé au Japon, personne ne m’a demandé si j’étais libanais, brésilien ou français. Pour les Japonais, un étranger est un étranger. » Mais alors, comment a-t-il pu forcer leur confiance ? « Ils sont sceptiques certes, mais vous donnent tout de même le bénéfice du doute, se demandant ce que vous allez leur présenter. » Les résultats ne se sont pas fait attendre, puisqu’en 2001, Carlos Ghosn se voit nommer PDG de Nissan, après avoir rapidement réalisé les objectifs de rentabilité qu’il s’était fixés en 1999.
« Être compétent sans être sage peut conduire au succès, mais le succès durable ne peut s’obtenir qu’avec ce mélange de savoir, de modération et de calme qui composent la sagesse, le tout accompagné de discipline et d’organisation », fait remarquer le leader emblématique. « Pour avoir de bons résultats à long terme, il faut également savoir planifier, mais là encore, dresser un plan sans travailler pour l’exécuter ne peut mener à la réussite. »
Et la chance dans tout cela ? « Elle joue beaucoup quand elle intervient au moment précis où vous êtes prêt », estime-t-il, s’avouant surtout chanceux parce qu’il est conscient de ses faiblesses. Finalement, qu’est-ce qu’un PDG qui a réussi ? La réponse fuse immédiatement : « C’est celui qui donne des résultats positifs. Un PDG qui mène son entreprise avec succès ne donne pas de mauvais résultats, sachant, bien sûr, que les résultats fournis doivent être évalués sur plusieurs années, parce qu’à longue échéance, si triche il y a, elle sera certainement démasquée. »
Un PDG comme lui, on se l’arrache, et Carlos Ghosn, qui est à la tête de 450 000 employés, confirme, en réponse à une question, que Steve Rattner, conseiller du président américain Barack Obama sur l’automobile, lui avait proposé le poste de PDG du constructeur General Motors mais qu’il avait refusé. Également, un PDG comme lui gagne des montants annuels de plus de 10 millions d’euros, et Carlos Ghosn ne s’en cache pas. « Vous pouvez en voir les détails sur les sites d’Internet », relève-t-il.

« Je ne suis pas un homme politique »
Sur les femmes, Carlos Ghosn affirme connaître parfaitement leurs préférences dans le domaine de l’automobile. Elles recherchent la sécurité et le confort et font passer au second plan la performance, précise-t-il, indiquant qu’« à l’échelle mondiale, c’est la femme qui, dans 66 % des cas, effectue le choix d’une voiture lors de son acquisition, quand bien même elle n’en serait pas propriétaire ».
Carlos Ghosn a quatre enfants, trois filles et un garçon. « J’ai toujours pensé à l’avenir de mon fils, mais surtout à celui de mes filles, me mettant à l’écoute de leurs ambitions et me préoccupant de rechercher le milieu adéquat dans lequel elles pouvaient réussir », assure-t-il, ajoutant toutefois que « trop aider ses enfants conduit à les affaiblir ». « Mon meilleur exploit est celui d’être un père réussi », dit-il.
Sur le point de savoir si Carlos Ghosn pourrait briguer un jour le poste de président de la République libanaise, l’homme d’affaires répond : « Je ne suis pas un homme politique et je ne peux l’être du jour au lendemain. » Pour le moment, sa contribution au développement de son pays d’origine consiste à s’impliquer dans l’immobilier dans les régions libanaises en voie de développement, et à investir dans la vigne, comme il l’a fait il y a quelques années à Ixsir, domaine viticole du Liban-Nord. « Beaucoup d’opportunités d’emplois ont ainsi été créées », se félicite M. Ghosn.
Et à la question classique de savoir quelle question il aimerait qu’on lui pose, l’industriel répond d’une façon assez atypique : « Aucune, car étant un homme public, je suis toujours envahi par les questions, alors que j’éprouve le plus grand plaisir lorsqu’on prétend qu’on ne sait pas vraiment grand-chose de moi. »

Source: Claude Assaf | Orient le jour

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